Pagina:Patrologia Latina 139.djvu/46

E Wikisource
Haec pagina nondum emendata est

dom Mabillon

sur plusieurs de ces lettres y répandent une grande lumière (An. l. XLIX, n. 63).

On n'a pas fait entrer dans le recueil, dont nous venons de rendre compte, toutes celles qui appartiennent à Gerbert. Il y en a grand nombre d'autres qui se trouvent dispersées dans divers recueils et dont il importe de donner une notice.

La première de cette classe qui se présente est celle que Gerbert écrivit à Séguin, archevêque de Sens, qui avait assisté au concile de Saint-Basle, où fut arrêtée la déposition d'Arnoul (Conc., ib. p. 744, 745). Elle paraît écrite aussitôt après qu'on eut appris en France ce que le Pape Jean XV avait fait en faveur de ce prélat deposé, et contre l'élection de Gerbert. Ainsi elle peut être de l'année 993. Comme

ce pontife interdit tous les évêques qui avaient eu part à cette grande affaire, Séguin craignit d'être enveloppé dans cette censure, quoiqu'il eût refusé constamment de consentir à la déposition d'Arnoul. Gerbert dans sa lettre entreprend de lui montrer par plusieurs raisons que sa crainte était vaine et mal fondée. Supposant, ce qu'il aurait peut-être fallu prouver, que le jugement rendu à Saint-Basle par les évêques était canonique, et par conséquent le jugement de Dieu même, il soutient que celui du pape ne peut être plus grand. Il cite à ce sujet l'endroit des Actes des apôtres où il est dit qu'il faut plutôt obéir à Dieu qu'aux hommes, et le huitième verset du premier chapitre de l'Epître aux Galates. Il y joint quelques maximes de S. Léon et de S. Grégoire

le Grand; et après avoir posé pour autres principes de son système, que la loi commune de l'Eglise est l'Evangile, les écrits des apôtres et des prophètes, les canons dictés par le Saint-Esprit, et consacrés par le respect de tout l'univers, et enfin les décrets du saint-siége qui y sont conformes, il conclut que quiconque se sera écarté de ces lois par mépris, doit être jugé suivant ces lois. Mais que pour ceux qui les observent, ils doivent être toujours en paix. Que Séguin doit donc se garder de s'abstenir des saints mystères, autrement ce serait se rendre coupable.

Gerbert ne s'attendait pas à être pape lorsqu'il écrivit cette lettre, qui combat de front les prétentions modernes de la cour de Rome, qui avaient

dès lors jeté de profondes racines. C'est pourquoi Baronius s'est mis beaucoup en frais pour la réfuter, et ne la rapporte dans ses Annales qu'à ce dessein (BAR. An. 992, p. 882-884). Elle avait été déjà imprimée à la suite des actes du concile tenu à Saint-Basle, dans l'édition de Francfort dont on a parlé (Rem. Conc., p. 143-146). Depuis, les PP. Labbe et Cossart lui ont donné place dans leur collection générale des Conciles (Conc., ib., p. 744, 745).

Une autre lettre de Gerbert, qui ne se trouve point dans le recueil de du Chesne, et qui suit de près la

précédente, est celle qu'il écrivit à Vildebolde, évêque de Strasbourg (Rem. Conc., p. 113-148). Ce prélat, qui était ami de Gerbert, l'avait prié de l'instruire de sa grande affaire. Gerbert le fit par cette lettre, qui est fort prolixe, et peut-être la plus intéressante de toutes les siennes. Il y discute deux points, l'un historique ou de fait, l'autre dogmatique ou de droit. Après avoir fait l'histoire d'Arnoul, son concurrent, et rapporté ce qui précéda et suivit son ordination, il entreprend de répondre à ce que quelques-uns disaient qu'on avait fait injure au pape en déposant ce prélat sans l'autorité du saint-siége. Gerbert parle ici en canoniste, et traite la matière qui concerne la différence des crimes et l'ordre judiciaire.


Gerbert, en finissant sa lettre (MART. am. Coll. t. I, p. 352), tâche de persuader qu'il n'était pas possible qu'un homme sans naissance, sans biens, étranger dans le pays, tel qu'il était, eût été préféré à tant d'autres qui étaient puissants dans le monde et distingués par leurs grandes alliances, pour remplir le siége de Reims; qu'il fallait donc que ce fût par une disposition particulière de celui qui élève de la poussière le pauvre, pour le faire asseoir entre les princes de son peuple. Il prie ensuite Vildebolde d'être l'interprète de son innocence et de le justifier auprès du roi et des prélats de sa connaissance des calomnies dont on le chargeait comme ayant usurpé le siége de Reims, et fait prendre Arnoul. Enfin il

termine cette longue lettre par se plaindre du triste état dans lequel le procédé de Rome avait jeté l'Eglise Gallicane. «Rome, dit-il, a été regardée jusqu'ici comme la mère de toutes les Eglises. Maintenant elle passe pour donner des malédictions aux gens de bien, et des bénédictions aux méchants.»

Cette lettre, étant fort peu connue, demandait qu'on en donnât une notice suffisante. Du Chesne en avait publié le commencement (t. IV., p. 114), que dem Marlot a fait depuis réimprimer d'après lui (Hist. Rem. t. II, l. I, c. 16, p. 51, 52). Dans la suite dom Martène

 , l'ayant trouvée plus ample parmi les papiers

de dom Mabillon, l'a insérée dans sa grande Collection (t. I, p. 351, 352) d'anciens monuments, croyant la donner entière. Mais il s'en faut de plus des trois

quarts. Ce qu'il en a publié de plus que les deux autres ne contient presque que la fin de la lettre. Encore y manque-t-il les deux ou trois dernières lignes. De sorte qu'on n'a cette rare pièce en entier qu'à la suite des actes du concile de Saint-Basle avec la lettre à Séguin (Rem. Conc. ib.).

On a une autre lettre de Gerbert, nouvellement découverte par les soins de dom Bernard Pez (Anec. t. III, part. II, p. 81-84), qui l'a trouvée à la suite du traité de géometrie du même auteur, dans le manuscrit de Salzbourg dont on a parlé. C'est une réponse

à la difficulté qu'Adalbolde le Scolastique avait proposée à Gerb