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citent.


20o Le plus intéressant des ouvrages de Gerbert est sans difficulté le recueil de ses lettres. Jean le Masson, archidiacre de Caen dans l'Eglise de Bayeux, en publia cent soixante, avec celles de Jean de Salisbéri et d'Etienne de Tournai, le tout en un volume in-4o, qui parut à Paris chez Macé Ruette l'an 1611. Cet éditeur les donna sur le manuscrit de Papire le Masson, avocat au parlement de Paris, son frère, qui avait dirigé cette édition, et qui est auteur de la Vie de Gerbert qui se trouve à la suite de ses lettres. On les fit passer bientôt après dans les différentes collections des Pères.

En 1636, André du Chesne en imprima un recueil beaucoup plus ample, à la fin du second volume de ses Historiens de France (t. II, p. 789-844). Il y est

divisé en deux parties. La première, quí ne contient qu'une lettre de plus que le recueil de le Masson, a été revue sur un manuscrit, à la faveur duquel le nouvel éditeur a corrigé plusieurs fautes qui s'étaient glissées dans la première édition, nommément dans la lettre 134. La seconde partie a été tirée d'un manuscrit du P. Sirmond, et comprend cinquantecinq lettres, qui n'avaient jamais vu le jour. C'est cette édition de du Chesne qu'on aurait dû prendre pour modèle lorsqu'on a entrepris d'incorporer les lettres de Gerbert dans les bibliothèques des Pères, qui ont paru depuis 1636. Mais c'est ce qu'on a même négligé de faire à l'égard de celle de Lyon, qu'on a voulu cependant rendre plus parfaite comme plus ample que les précédentes.


On n'y a imprimé de ces lettres que ce qu'en avait publié le Masson (Bib. PP. t. XVII, p. 669-691).

Dans l'une et l'autre partie de ce recueil de lettres on n'a gardé aucun ordre chronologique entre elles. Pour l'ordre des matières, il n'était pas possible d'y en établir aucun, tant les sujets sont variés et quelquefois multipliés dans les mêmes lettres. La plupart sont fort courtes et rarement intéressantes, quoiqu'on ne laisse pas d'y trouver des traits historiques et littéraires qui servent à éclaircir ce qui se passait alors dans l'Etat et quelquefois dans l'Eglise, et la culture des lettres. Il y en a d'autres qui contiennent d'excellents avis et de sages conseils; mais le caractère dominant du plus grand nombre est un génie de politique et d'intrigues. Aussi plusieurs sontelles

adressées aux papes, aux empereurs, aux rois, aux impératrices et autres princesses, à des archevêques qui avaient beaucoup de part aux affaires publiques; ou écrites au nom de ces mêmes puissances, qui employaient souvent la plume de Gerbert. Il y en a une un peu vive au nom de Thierri, évêque de Metz, au prince Charles, frère du roi Lothaire (ep. 31), et une autre (ep. 32) encore plus vive, au nom de Charles, en réponse au prélat. Elles firent apparemment du bruit, puisque Gerbert se crut obligé d'écrire à Thierri (ep. 33) pour lui déclarer

avec quel esprit il s'était porté à faire cette réponse.

Ces deux lettres pleines de vivacité, rapprochées d'unc autre (ep. 75) qui ne respire que la tendresse, montrent que Gerbert savait accommoder son style aux différents sujets qu'il entreprenait de toucher. Celle-ci est au nom d'Emma, reine de France, sur la mort du roi Lothaire, son mari, à l'Impératrice Adelaïde. Une des plus intéressantes comme des plus longues , est celle que Gerbert adresse à une autre Adelaïde, reine de France, femme de Hugues Capet, et à tous les suffragants de l'Eglise de Reims. L'auteur y défend son ordination en qualité d'archevêque de cette métropole, d'où l'on pensait alors à l'expulser pour

y rétablir Arnoul. Il y discute les motifs qu'on croyait en avoir, suivant ce qu'il en avait appris du bruit public.

Les lettres de la seconde partie nous instruisent particulièrement de ce qui se passa en conséquence de l'élection d'Arnoul et de celle de Gerbert en sa place. On y voit les actes de cette double élection avec la profession de foi de Gerbert. Il y en a quelques-unes écrites au nom d'Arnoul; mais la plupart sont au nom de Gerbert, comme archevêque de Reims, quoiqu'il n'en prenne pas la qualité, et rarement celle d'évêque en général. Les deux dernières (ep. 54, 55), qu'on a insérées dans la Collection des conciles (t. IX, p. 777-779), ne furent écrites que lorsqu'il était pape. Nous avons déjà donné une

idée de la dernière, par laquelle Silvestre confirme le rétablissement d'Arnoul, en quoi elle est remarquable. La pénultième, que le Masson avait déjà publiée à la tête de son recueil, mais hors du corps de l'ouvrage, est écrite à Azelin ou Ascelin, le même qu'Adalberon évêque de Laon. Elle est fort vive et chargée de grand nombre de reproches. Après quoi Silvestre cite ce prélat à Rome, pour y être jugé dans un grand concile qui s'y devait tenir dans la semaine de Pâques.

En général Gerbert prend rarement quelque qualité à la tête de ses lettres. Celles qu'on y lit quelquefois, sont les titres de Scolastique et d'abbé écolâtre, Scholaris abbas (ep. 7, 12, 142, 148, 161).

Il ne s'y qualifie qu'une seule fois abbé de Bobio

(ep. 14); quoiqu'il ait retenu cette abbaye jusqu'à son pontificat.

Deux choses concourent particulièrement à rendre ses lettres obscures, et empêchent qu'on en tire tout le secours qu'on pourrait en tirer: le laconisme avec lequel elles sont écrites, et le défaut d'inscription à la tête d'un grand nombre. D'autres fois les noms des personnes à qui elles sont adressées ou dont elles parlent n'y sont designés que par les initiales. Tout cela montre le besoin qu'on aurait de bonnes notes pour les éclaircir. Les remarques qu'a faites